vendredi 5 janvier 2018

Littéralement


P.O.L pouvait s’épeler en trois lettres ou se prononcer en une seule syllabe, POL, et alors le sigle devenait acronyme, et cet acronyme se confondait avec le prénom de la personne. La totalité du nom se replie dans les lettres initiales ou dans le prénom entier. Ce jeu perecien sur l’identité, à la lettre, donne le vertige. C’est un dispositif prometteur pour un romancier, ou un éditeur qui se cache. Il laisse des orphelins : ses auteurs, et plus encore ceux qui rêvent d’écrire, et qui auraient aimé l’avoir pour premier lecteur.

Le Magazine littéraire sort sa nouvelle formule. J’ai eu en main le premier numéro. Sur la couverture, Le Magazine est en très gros caractères, littéraire en tout petit, en-dessous, caché sous le gros titre, à peine visible. Cache-toi, littérature ! (Écrivant cela, je lis la même remarque dans le blog de Philippe Annocque.)

Dissymétrie de la correspondance : jamais parité ni équilibre, toujours un.e qui commence et un.e qui arrête avant l’autre, pour cause de décès, rupture, désinvestissement. On en perd des lettres, on en brûle, on en fait retour à l’envoyeur, si bien que le corpus, comme on dit, est plein de trous. Sollers publie à part ses lettres envoyées à l’amante. On annonce pour plus tard les lettres reçues. Choix éditorial étrange. Pour doubler la vente ? Le dialogue épistolaire se coupe en deux monologues qui ne se croisent pas. À moins de massicoter les deux livres, et d’en faire un seul en alternant les lettres ?

Quoi qu’on pense sur le fond des discours des Invalides et de la Madeleine, Macron, bon acteur et bon diseur de textes, revivifie l’éloge funèbre, tombé en désuétude depuis Malraux. Aux grands morts les grands mots, mais l’inverse n’est pas faux non plus : c’est par les grands discours que les défunts paraissent plus grands morts que vivants.

Partition pour piano à quatre mains : on comprend bien, les deux pianistes sont côte à côte et utilisent deux fois deux mains. Mais pour les écrivains qui écrivent à deux, genre les frères Goncourt ? L’habitude est aussi de parler d’une écriture à quatre mains. Pourtant, chacun ne tient la plume que d’une main. Sauf si l’on se trouve en présence de modernes Bouvard et Pécuchet installés sur un double pupitre, chacun devant son écran : sur les deux claviers, ce sont bien quatre mains qui s’agitent pour enregistrer les bêtises du discours ambiant.

« Les écrivains ne sont pas des gens enfermés dans leur tour en ivoire » (un écrivain, responsable d’un atelier d’écriture).

Faire la liste des livres que personne n’a jamais lus jusqu’au bout : La Divine Comédie (on s’arrête en sortant de L’Enfer), Don Quichotte, Le Capital, L’Idiot de la famille, Le Capital au XXIe siècle, etc.

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