dimanche 2 avril 2017

L’allégorie de l’écrivain et du politique


S’il était possible de tenir pour négligeables les personnalités de Christine Angot et de François Fillon, on pourrait voir dans leur face-à-face télévisé du jeudi 23 mars sur France 2 une allégorie de la rencontre ratée, toujours ratée, entre l’écrivain et le politique.

L’écrivain arrive avec un texte écrit, bien écrit mais mal lu. Il n’a pas le don de l’improvisation, ni de la répartie. Écrire, c’est le contraire de parler. Le politique sait parler, il ne sait faire que cela, d’ailleurs, parler en public. Son pouvoir se confond avec la maîtrise de la parole. Il parle haut, fort et distinctement. On lui a préparé des fiches mentales, des éléments de langage. L’écrivain bredouille, bafouille, il fait des brouillons oraux. « C'est déjà tellement difficile de parler. C’est à ça que sert la littérature, parce qu'on ne peut pas parler avec des gens comme vous. »

Le politique s’épanouit dans le débat, faux débat, préparé, sans écoute, mais il installe un semblant de dialogue. L’écrivain monologue. « Ce n’est pas un dialogue », dit-elle. La vérité de sa parole est en quelque sorte verticale, ciel des idées et profondeur des tripes. La parole politique est horizontale, comme un jeu de raquettes truqué.

L’écrivain est hystérique. Il exprime des émotions, parle avec son corps. Il somatise la violence du corps social. Le politique s’est dressé à la répression des sentiments. Il feint d’être le porte-parole d’une société sans violence. Comme l’État, c’est un monstre froid. Quand il s’échauffe, « fend l’armure », comme on dit, c’est pour la galerie.

Le politique a un public avec lui, pour lui, des soutiens physiquement présents, qui applaudissent, conspuent, insultent. L’écrivain est seul. Ses lecteurs ne sont pas ses électeurs.

À la fin, c’est le politique qui gagne à court terme, et l’écrivain à long terme.

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