dimanche 10 juillet 2016

Disparitions


Malheureux le Poète et le Politique qui disparaissent un jour de football et de Tour de France.

Trop de disparitions dans l’actualité. Il n’y aura pas de place pour tout le monde. Certains grands morts font de l’ombre aux plus petits. On dit que tous les hommes sont égaux devant la mort. C’est faux : on les hiérarchise autant que les vivants.

La gêne de devoir prononcer l’éloge funèbre de celui qui ne vous a pas ménagé de son vivant, jusque dans son testament, est largement compensée par le plaisir d’avoir le dernier mot.

Ce n’est pas le tout de mourir : encore faut-il ne pas se tromper sur ceux qui revendiqueront l’héritage.

Du poète, il ne lui venait à l’esprit que des anecdotes personnelles si prosaïques qu’elles détruisaient la rime et le rythme.

Il pensait si vite que les mots ne suivaient pas ; il en mangeait la moitié. Mais les électeurs n’aiment pas les politiques qui pensent. Ils préfèrent les bêtes de scène ou de cirque, ceux qui s’accrochent, ceux qui se relèvent, ceux qui ne sont jamais morts, les arracheurs de dents qui mentent et qui font saigner.

À la fin de ses « Radioscopies », Jacques Chancel posait toujours la question qui tue : « Et votre mort, vous y pensez ? » Comme ça, c’était fait, par anticipation. Le moment venu, les chacals de l’info pouvaient sortir du frigo un bout d’auto-nécrologie.