dimanche 22 mai 2016

À la manière de…

Rue Damiette, à Rouen, sur une vitrine



On dirait du Mozart
dit Mozart
et il jeta sa partition

Mystère : Mozart écrit toujours du Mozart, c’est reconnaissable. C’est même ce qu’on appelle le style, cette signature sonore, ou picturale, ou inscrite dans la langue.
Du pur Mozart, ce qu’il était seul à pouvoir faire (on identifie les épigones, les suiveurs, les plagiaires) et qu’il ne pouvait pas ne pas faire.
Lui est-il arrivé de jeter une partition en jugeant qu’il imitait Mozart ? Ce n’était pas du mauvais Mozart (du mauvais Mozart est encore de la bonne musique), mais d’un musicien sachant qu’il est déjà Mozart, cultivant sa mozartitude, se regardant au miroir, se voyant peindre du coin de l’œil, ou s’écoutant jouer. Comme si « Mozart » n’était pas cette marque qu’on ne pourrait lui donner qu’à la fin, quand il aurait tout épuisé, mais la statue déjà sculptée dans le corps vivant.
Parfois, en lisant les plus grands, Proust, Céline, Duras, on se dit qu’ils nous donnent de la prose proustienne, célinienne ou durassienne. Du pur Duras, du Duras à la puissance deux, mais parfois aussi sorti de la plume d’un auteur nommé Duras, qui aurait relu des livres signés Duras avant de se relancer sur la page.
Même Flaubert, dans Bouvard et Pécuchet, se souvient parfois d’avoir été l’auteur de Madame Bovary, quand il dit l’ennui de la campagne.