lundi 25 avril 2016

26 avril 1986


Je me souviens qu’il faisait un temps superbe en cette fin de semaine (on disait moins week-end il y a trente ans), sur toute la France, et qu’on s’était bien exposés au soleil. Moi, c’était sur une terrasse mal finie d’un pavillon, près de Sablé-sur-Sarthe. Pour la première fois depuis l’après-guerre le calendrier collectif se confondait avec l’agenda intime : chacun sait où il était et ce qu’il faisait ce jour-là, comme plus tard le 11 septembre et plus récemment le 13 novembre, sauf qu’on n’a pas mesuré tout de suite les retombées mondiales.

C’est après Tchernobyl qu’on s’est avisé d’établir une police des frontières, pour surveiller le passage en contrebande des nuages radioactifs.

Le champignon est une plante étrange : le nuage atomique prend sa forme, et c’est le végétal qui concentre le plus de radiations.

Dans les zones contaminées, les animaux prolifèrent, les loups régnant en maîtres. On sait maintenant à quoi ressemblera la terre quand l’homme s’atomisera.

L’humanité avait un passé très lointain, des siècles, des dizaines, des centaines de milliers d’années en arrière. Depuis Tchernobyl, cette profondeur du temps a pivoté dans le futur : des siècles, des dizaines, des centaines de milliers d’années avant la décontamination.

En cas d’accident nucléaire, les chargés de communication ne donnent pas la dose de radiation réelle, mais la dose de vérité que la population est capable de supporter sans paniquer.