dimanche 14 février 2016

Justin et Emma


Pour la Saint-Valentin, ce chant d’amour du petit Justin, le commis de Homais, à Madame Bovary morte. C’est le seul amoureux vrai d’Emma : juste un. Vous n’avez pas lu ces lignes dans le roman ? Normal : elles figurent dans les brouillons. Flaubert ne les a pas retenues pour le texte final. On peut les trouver dans l’édition intégrale des manuscrits, à l’adresse : http://www.bovary.fr. Ce passage figure dans le vol. 6, f° 296.

Code de transcription : […] barré ; <…> ajout entre les lignes ou dans la marge



C’était Justin. il pleurait sur la fossée [sic] comblée. il se maudissait <sa jeunesse>. il s’accusait de cette mort. il était plus [triste &] <[plus désolé plus]> désespéré que s’il eût perdu sa mère. Elle avait été pr lui la <seule> femme qu’il l’eût [sic] au monde <dans la contemplation permanente de cette femme qui était pr lui la seule femme du monde> et il [l’adora] l’aimait, confusément dans le tumulte de sens [à leur éveil] <vierges avec> le premier ébahissement de la beauté & les [langueurs] < mélancolies> de la passion qui s’ignore. il s’apercevait <maintenant> de l’immense douceur qu’[il y avait eu à vivre près d’elle] elle <avait répandue sur sa vie> & sentait un vide [aff] nouveau en lui, sentiment d’autant plus fort qu’il était <désintéressé> sans analyse ‒ sans espoir, ni but. C’était comme un <instinct> blessé ‒ comme une religion détruite. <comme un soleil perdu>

et libre maintenant de toute contrainte ‒ il s’en donnait (de sa tristesse) à plein coeur, tout à son aise, abondamment à genoux & ne pouvant arracher de ses yeux de cette place où était enfermé cet être <si doux &> si beau [si bon] qu’il ne reverrait pas. La lune, de temps à autres entre des nuages bruns ‒ il la regardait dans le ciel ‒ & [plus] trempé de pleurs & secoué comme les branches des sapins que le vent agitait <courbait> autour de lui.

[et plus tard. quand il apprit ‒ tuée [pr] & peut-être pr lui & en conçut tant d’estime pr lui-même qu’il devint un cavalier parfait aplomb. [Cavalier parfait]]
[Justin, quand son patron fut couché, s’esquiva et fut au cimetière ‒ 
il s’agenouilla sur la terre ‒ prosterné ‒ priant désolé. il se reprochait d’être la cause de sa mort. ‒ le sentiment d’une profanation d’un sacrilège. un crime énorme. ‒ il avait détruit la Femme par excellence <la Beauté>. une impératrice un ange. ‒ la source de Voluptés d’autant plus infinies qu’il ne les connaissait pas <ne sachant quoi prendre pr elle, quoi enfouir ‒ besoin de sacrifice. casser 2 branches de sapin croix.>]

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